La météo à Dumont d'Urville

Parlons météo ! 

Chaque mission météo est composée de trois membres 

Un chef de mission ( Antoine pour cette mission TA57 ) 
Un technicien d'exploitation ( Geneviève en l'occurrence…) 
Un technicien d'installation et maintenance ( Pierre ) 

Petite partie technique pour énumérer les tâches dont nous devons nous acquitter

L'observation du temps : toutes les trois heures, codage et transmission de messages d'observation ( SYNOP ). Les valeurs de pression, vent, température, humidité, insolation et rayonnement sont données automatiquement par les capteurs situés dans et à côté de l'abri météo. La description du ciel ( nébulosité et différentes couches de nuages ) , les phénomènes ( neige, blizzard, mur de neige…) et la visibilité sont évalués par l'observateur. Ces SYNOP sont transmis par satellite à Toulouse, où le super calculateur les avale avec des milliards d'autres données, les digère pour nous donner un modèle de prévision. 
La climatologie de la station : tous les paramètres précédemment énumérés constituent une base de données qu'il faut quotidiennement vérifier, compléter en cas de " trous ", puis sauvegarder. Cette année viendra s'ajouter aux quelques cinquante ans collectés depuis la création de DDU et servent à l'étude du climat. 
La prévision : ce n'est pas la " vocation " de la station, mais la demande est forte sur la base, surtout en campagne d'été : l'Astrolabe, les services techniques, les manips scientifiques… En hiver, c'est la sécurité qui prime avant toute sortie sur la banquise. Le petit bulletin météo quotidien est toujours très attendu. Avec le peu de moyens dont nous disposons ( quelques cartes australiennes reçues par radio-fax et peu de photos satellites) nous essayons de satisfaire la demande, en tout cas sur une échéance de 24 heures à 48 heures. 
La maintenance : et ce n'est pas la moindre des tâches, le matériel étant soumis aux rigueurs du climat adélien. Quand il ne faut pas réparer, ou remplacer, il faut tester, anticiper les pannes. 
Le radiosondage (Un autre challenge !) : une fois par jour, à 09h30 locales, nous envoyons dans l'atmosphère un ballon gonflé à l'hélium. A ce ballon est attachée une sonde (boîte en polystyrène avec 2 piles) qui contient des capteurs de température, pression, humidité, ainsi qu'un GPS (il permet, en donnant la position de la sonde, d'en déduire la direction et la vitesse du vent). Ces paramètres sont transmis toutes les secondes (petite antenne d'émission sur la sonde et récepteur au sol). Le sondage nous donne un état vertical de l'atmosphère en un lieu donné (140 Est et 66 Sud pour DDU). Et comme le SYNOP, il est envoyé à Toulouse et finit dans l'estomac du super calculateur pour aller alimenter devinez quoi ? le modèle de prévision, bien sûr. Il faut lâcher le ballon par tous les temps, d'où le challenge, sachant que le vent peut atteindre 200 km/h en pointe ( et même plus…).

Participation des membres de la mission

Je suis en train de remplir un diplôme de lâcher de ballon. Quand le vent n'est pas trop fort, le lâcher de ballon peut être fait par des néophytes. Ce matin, c'était le tour d'Arthur, notre jeune boulanger pâtissier de 18 ans. Au dernier moment, le vent s'est renforcé. Mais il s'en est tiré avec les honneurs. D'où le diplôme, validé par la signature de l'équipe météo TA 57. C'est un rituel perpétué par toutes les missions météo. On écrit quelquefois sur le ballon, au feutre à bille plate afin de ne pas l'endommager : " Joyeux Noël " , " Bonne Année ", " Joyeux Anniversaire ma Chérie ", etc. Le ballon est fait en latex, et comme je l'ai dit plus haut, gonflé à l'hélium. Ce gaz a une particularité : aspiré par grosses bouffées, il déforme les cordes vocales et on a pendant quelques secondes la voix de Donald Duck. C'est le fou rire garanti !

Situation sur la base

La station météo se trouve dans le même bâtiment que les services techniques de l'institut polaire (la logistique), et la salle de gym (deux vélos, un rameur, un espalier et des poids et haltères). 

Deux pièces sont allouées à la Météo :
1) la salle d'exploitation est à l'angle du bâtiment, avec plein Nord vue imprenable sur la mer (la banquise en hiver) et à l'Ouest vers le continent antarctique (à 5 km) Antoine et moi y avons notre bureau. 
2) l'atelier de maintenance, plus petit et contigu à la salle d'exploitation. C'est le domaine de Pierre.

Polyvalence

Mais le maître mot dans cet environnement est la polyvalence. Aussi Pierre participe aux tâches d'observation et de radiosondage. Et Antoine et moi investissons souvent l'atelier de Pierre. Nous fonctionnons 7 jours sur 7. Ouverture à 08h00 et fermeture à 22h00 (22h00 correspond à 1200 UTC, temps universel de référence / méridien de Greenwich). Ici, pas d'heures supplémentaires comptabilisées, pas de jours fériés bonifiés, à nous de nous répartir équitablement le travail. Notre séjour sera suivi d'un congé administratif d'environ 4 mois. Mais tout cela semble pour l'instant bien loin, rien ne presse !

Voilà, vous avez peut-être, maintenant, une idée du travail d'un météo à Dumont d'Urville. Nous n'échangerions notre place pour rien au monde, conscients de la chance qui est la nôtre. Ce séjour est bien sûr basé sur le volontariat, et nous avons dû, comme tous les hivernants, passer des tests psychologiques et des examens médicaux. Il faut tenir la distance et " durer " un an.

Et la mission météo de la TA57 est bien partie pour durer…

 

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