LAMBERT Gérard

 

Campagne d'été Dumont d’Urville 1969

responsable du programme RACEA

 

En Terre-Adélie le programme de mesure de la radioactivité des aérosols de Gérard Lambert débute dès l'hivernage 1960 (programme RACEA). Pour tous il consiste essentiellement à pomper de l'air et à le filtrer d'où son surnom de shaddock. Gérard Lambert viendra, lui-même, en campagne d'été, rénover son laboratoire en 1969. (Bernard Morlet)

 

 

Gérard Lambert nous a quitté, le 4 août dernier, discrètement, à l'âge de 78 ans. Il a été l'une des grandes figures du Centre des Faibles Radioactivités (CFR) et il est à l'origine de plusieurs des orientations scientifiques actuelles du Laboratoire des Sciences du Climat et de l'Environnement (LSCE) que le CFR a contribué à fonder.

Gérard Lambert a rejoint à Saclay en 1957 le groupe de géophysique nucléaire créé par Jacques Labeyrie. Là, il s'intéresse aux émissions naturelles de Radon, un gaz qui est principalement émis par les roches continentales en raison de leur teneur en uranium, si faible soit-elle. Ce gaz a la propriété de se désintégrer en donnant naissances à des atomes de métaux radioactifs, qui se fixent sur les particules en suspension dans l'air et constituent donc des traceurs de la circulation des masses d'air. Gérard Lambert s'intéresse dans le même temps aux aérosols radioactifs produits artificiellement lors des explosions nucléaires aériennes et qui se mélangent aux aérosols naturels. Il développe un petit groupe de recherches qui mesure le transport atmosphérique de ces aérosols radioactifs, artificiels ou naturels. Il soutient sa thèse de doctorat en novembre 1963 sur leur comportement au sein des masses d'air et ouvre la voie de l'utilisation des traceurs radioactifs pour quantifier la dynamique atmosphérique. Pour ce faire, il a développé un protocole expérimental varié faisant appel à un réseau terrestre, des mesures en milieu marin sur des navires marchands et des mesures en ballon. Cet ensemble de mesures qui s'est poursuivi pendant plus de dix ans a contribué à montrer le long temps de résidence des aérosols dans la stratosphère, l'importance des injections de printemps d'air stratosphérique dans la troposphère, la faiblesse des transports méridiens d'air troposphérique avec notamment l'existence d'une barrière équatoriale qui ralentit considérablement les échanges entre les deux hémisphères. Il met aussi en évidence les processus de nettoyage de la troposphère et montre qu'à côté du nettoyage par les précipitations, le dépôt sec des aérosols peut être prépondérant pour des d'aérosols injectés directement dans la troposphère.

Dès cette époque il s'intéresse à l'atmosphère de l'hémisphère Sud où il fait effectuer des prélèvements à partir des navires ravitailleurs et de stations fixes dans les Terres Australes et Antarctiques Françaises (Antarctique et îles subantarctiques). Il découvre à cette occasion les orages radoniques qui sont la caractérisation d'un renforcement des transports méridiens et du passage exceptionnel, discontinu, de masses d'air en provenance du contient sud-africain.

Attiré par l'enseignement, il devient en 1966 Professeur à l'Université de Picardie à Saint Quentin mais il poursuit ses recherches au CFR où il développe un groupe d'étude de la physico-chimie de l'atmosphère qui constitue la première pierre des activités environnementales atmosphériques du LSCE. Il terminera sa carrière comme Directeur de recherches au CNRS où il est détaché à partir de 1985.

Les aspects abordés par Gérard Lambert et son équipe témoignent de son extraordinaire ouverture d'esprit :

études des composés chimiques produits par le plancton et injectés dans l'atmosphère marine (composés soufrés résultant de l'oxydation du DMS produit par le plancton, hydrocarbures non méthaniques, etc.).

mise en évidence de l'injection de Po-210 dans l'atmosphère par les gaz volcaniques et son application pour quantifier la dynamique du magma. 

développement d'un réseau de mesure de la concentration en gaz carbonique dans l'atmosphère qui a commencé par la création d'une station fixe à l'île d'Amsterdam. Celle-ci permet de suivre l'évolution de la concentration moyenne du CO2 atmosphérique loin des sources de pollution et à l'abri des variations saisonnières dues à l'activité biologique des forêts. Ce réseau s'est progressivement développé à l'échelle européenne et a été formellement intégré à l'effort international de suivi du CO2 atmosphérique. Il est un élément clé pour évaluer au plan mondial les émissions de gaz carbonique de chaque continent.

mesure de l'injection d'aérosols carbonés par les feux de biomasse en les caractérisant par leurs forts rapports 210Po/210Pb en raison de la haute température de ces combustions.

Gérard Lambert a été un pionnier des applications des traceurs radioactifs à la dynamique atmosphérique et a très largement contribué à lancer en France les recherches sur la physico-chimie de l'atmosphère. Les grands thèmes de recherche atmosphérique que développe maintenant le LSCE tirent leur origine des travaux de Gérard Lambert. Ces dernières années, il a su transmettre à la communauté scientifique et au grand public sa vision claire de l'évolution de la planète en animant un programme au Palais de la Découverte, en écrivant plusieurs livres sur le climat et en participant à la rédaction d'ouvrages collectifs sur la radioactivité et sur "le méthane et le destin de la Terre". Nous gardons tous un souvenir profond de sa gentillesse et de son aptitude pédagogique à exposer en termes simples les phénomènes les plus complexes qui se développent dans l'environnement.

Jean-Claude Duplessy 

Directeur de recherche au CNRS 

Ancien directeur du Centre des Faibles Radioactivités (CFR) et Laboratoire des Sciences du Climat et de l'Environnement (LSCE) 

Président des Expéditions Polaires Françaises

 

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